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Entretiens avec Marcel Duchamp
(selecció de fragments)


Georges Charbonnier



"L'ésoterisme existe toujours, existera toujours, mais il peut être oblitéré par une époque - une époque comme la nôtre, par exemple, qui, depuis cent ans, à mon avis, n'a rien produit au grand sens du mot, surtout à cause de l'immixtion du commercialisme dans la question." (pàg. 16)



"Parce que , dans mon activité personnelle, ce que j'ai preferé, c'était faire une chose qui m'intéressait, surtout basée sur une idée beaucoup plus 'matière grise' que 'visuelle' - en peinture, en tout cas. Alors, cette idée étant à la base de ce que je voulais exécuter, quand je l'avis fini, j'aurais pu recommencer, en faire une seconde, une trosième, une cinquième, une vingtième …
- …le tirage
-… et ça, j'y ai toujours repugné. Y ayant répugné, il est arrivé que j'ai produit extrêmement peu. Parce que je en pouvais pas répéter. L'idée de répéter, pour moi, est - chez un artiste - une forme de mastrubation. C'est d'ailleurs très naturel. C'est de mastrubation olfactive, si j'ose dire. C'est à dire que, chaque matin, un peintre qui se réveille a besoin, en dehors de son pétit-déjeuner, d'un peu d'odeur de térébenthine. Et il va à son atelier parce qu'il a besoin de cette odeur de térébenthine. Si ce n'est pas de la térébenthine, c'est de l'huile mais c'est olfactif, nettement. C'est le besoin de recommencer la journée. C'est-à-dire une forme de grand plaisir seul, onanique presque, vous comprenez. Ce n'est pas du tout à reprimer, mais c'est un peu ce qui se passe. C'est ce côté presque fonctionnaire de l'artiste qui travaille pour liu tous les jours au lieu de travailler pour le gouvernement, comprenez vous?"
(pàg. 17-18)



"Et moi, c'est un reproche -c'est complètement personnel- que je lui fais [au surréalisme] : ce vesoin de se servir des mots, qu'ils soient nouveaux ou anciens, pour traduire l'inconscient, si vous voulez, ce qui se passe en nous. C'est une formule à laquelle je en crois pas du tout: que la langue ou les mots puissent traduire de façon exacte ou précise tout ce qui se passe sous l'individu et non pas en dehors de l'individu, vous comprenez … La traduction par les mots de ces phénomènes est trés approximative, plus qu'approximative et souvent fausse …"
(Pàg. 51)


"D'abord, j'ai eu cette période complètement cubiste qui s'est terminée en 1914 ou même un peu avant, en 1913. Et tout ce que j'ai fait, d'ailleurs, c'est une seule chose, qui m'interessit: c'est introduire, justement, des éléments qui n'étaient pas du domaine rétinien dont nous parlions. Ce problème, pour moi, a été trés dur parce que je n'avias aucun point d'appui.souvent, quand on dit: "Monsieur Untel est influencé par Monsieur Untel", c'est facile,parce que l'influence sert à beaucoup, quand même. Même si l'on déforme l'influence par sa personnalité, c'est qunad même une influence. Et j'avais été influencé, comme tout le monde.Quand on a v9ingts ans, on en peut pas éviter de l'être. Mais, dès vingt-trois ou vingt-quatre ans , vers cet âge-là, je crois, j'ai voulu m'en débarrasser autant que possible, sachant qu'il existait une chose qui s'appelle influence et qui peut être néfaste, si elle est exagerée."
(pàg. 53-54)


"Nus vites, c'est très simple,évidemment, c'est un plaisir, justement, à jouer avec les mots. Quoique … Vous savez ce que j'en pense, des mots. (…) Donc je m'en suis servi avec mes nus. Avec l'idée aussi, très importante, d'introuduire le rire, dans le sens bon du mot. Pas le rire grossier ou la moquerie, mais l'humour d'une certaine qualité, encore difficile à exprimer.
        Je considérais que tout le passé - la tradition -sauf Rabelais et Jarry était fait de gens sérieux qui considéraient que la vie était une chose sérieuse, qu'il fallait produire des choses sérieuses pour que la posteriité sérieuse comprenne ce que tous ces gens sérieux de cette époque avaient fait! Ça, j'ai voulu m'en débarrasser aussi. Donc, j'ai mis les mots nus vites qui n'étaient plus sérieux du tout. Il s'agissait même pas d'en rire, mais de se demander si je me moquais du monde."
(pàg. 55-56)


-Au fond, tout le monde est entouré de ready-made …
-Exactement.
-Il n'y a même que cela …
-Et pour éviter, justement, de choisir ce qui rappelle un passé - ou même un avenir - esthétique. C'était là le point important. Parce que c'est facile de choisir une chose qui vous plaît. Ce "plaît" est basé sur vos traditions, votre esprit de goût. Il fallait choisir quelque chose sans goût, insipide. C'est difficile, évidemment. Même si l'on peut trouver qu'un porte-bouteilles est joli à regarder, c'est d'abord insipide. Nettement. Ça n'a pas de goût, et par conséquent, çá remplissait le rôle que je voulais. Je voulais que mon choix ne soit pas influencé, en tout cas, par tout ce que je voulais démolir. C'était ça, la difficulté du problème.
        Je suis même arrivé, dans un restaurant, à faire un ready-made d'un grand tableau complètement imbécile qui était signé pàr un autre peintre que je ne connsaissais pas. Par un geste de ready-made, cette grande décoration, j'ai été la signer dans un autre coin.
        Ç'a prend la forme humoristique qui est nécessaire, à la base du ready-made. Il ne faut pas en faire une chose sérieuse. Il faut que la gaieté du choix intervienne.
-Arbitrairemente, je me projette sur n'importe quoi.
-Exactement."
(pàg. 66)


-Est-ce que le silence n'est pas au bout du ready-made?
-Vraisemblablement, oui. Il était difficile de renchérir, sivous voulez, sur l'idée sur l'envol vers quelque chose d'autre encore. On en peut pas se renouveler constamment et, comme mon ambition, c'est de me renouveler dans chaque chose …Je ne penserais pas à choisir un readty-made aujourd'hui, comprenez-vous?"
(pàg. 68-69)


"-Nous [Marcel Duchamp et Francis Picabia] essayions d'être plus généraux que le surréalisme. Beaucoup plus indépendants , si vous voulez. Le surréalisme a voulu faire quelque chose qui s'inscrive dans le cadre d'une société x ou y. Il est arrivé plus ou moins. Mais, chex nous, il n'y avait même pas cette idée de s'inscrire quelque part. Nous ne voulions pas nous inscrire. Nous étions dadas, beaucoup plus que Dada. Parce que nous aurions détruit Dada aussi, si nous avions pu. Comprenez-vous? Il y avait l'idée, simplement, de en s'inscrire nulle part et de ne briguer aucune notoriété."
(pàg. 70)


"-En quelle année êtes-vous arrivé aux Etats-Unis?
-En 1915. (…)
        C'est interessant; je suppose que c'est un peu banal aussi, de changer de pays. Mais j'ai peut-être eu l'esprit d'expatriation - si c'est un mot - parce que ça faisait partie d'une possibilité de sortir de moi, au sens traditionnel du mot, c'est-à-dire de ma naissance, de mon enfance, de mes habitudes, de ma 'fabrication' toute française. Le fait d'être transplanté dans un milieu complètement nouveau au point de vue de l'environnement a une chance de vous permettre une éclosion différente. Ce qui est arrivé avec moi. Il est certain que ça m'a beaucoup aidé à me débarrasser de scories traditionnelles, de scories normales, régionales de l'individu qui naît dans son patelin et qui n'en sort jamais."
(pàg. 76)


"Supposez que le plus grand artiste du monde soit dans un désert ou sur une terre sans habitants: il n'y aurait pas d'art, parce qu'il n'y aurait personne pour le regarder. Une oeuvre d'art doit être regardée por être reconnue comme telle. Donc, le regardeur, le spectateur est aussi important que l'artiste dans le phénomène art."
(pàg. 82-83)


"Autrement dit, nous fumons une cigarette chacun de notre côté. Il y a deux façons de la fumer: la votre et la mienne. Il n'y a aucune comparaison même si, apparentment, nous fumons de la même façon."
(pàg. 86)


"Le prix, que ce soit en monnaie ou en valeur morale, est curieux aujourd'hui. C¡est un drôle de constation, l'importance que ça a pris dans la vie courante, en tout cas, dans tous les pays occidentaux. Et on se demande pourquoi cette espèce d'intrusions de l'art dans la vie de tous les jours, de tout le monde -ce qui n'existait pas il n'y a même pasd cijnquante ans. Est-ce une bonne chose, une mauvaise chose? Je en crois pas que ce soit une bonne chose. Je crois que les prix, en monnaie, sont inquiétants. Si la maonnaie augmente, il faut qu'ils continuent à augmenter. Est-ce qu'une chose numérique peut toujours augmenter? C'est encore un problème mathématique, plutôt qu'autre chose. Si elle n'augmente pas, il y aura ce qu'on appelle un krach, une dégringolade subite due à une catasttophe politique ou à autre chose. En tout cas, ça peut se produire. Ça s'est déjà produit dans le pasé.
-Mais comment peut-on comprendre que la notion de prix soit attachée à la notion d'oeuvre d'art?
-Impossible à comprendre! Et complètement ridicule, justement, d'attacher une étiquette. C'est antinomique en soi. L'oeuvre d'art n'a pas de valeur d'ordre numérique ou même d'ordre moral. Aucune. C'est une chose qui s'impose par sa présence, uniquement, et cette présence est telle qu'elle passe de siècle en siècle, est conservée comme une chose unique qui, donc, n'a pas de prix.
        Le prix moral, le fait qu'une chose qui a été faite en 1530 sot encore visible , aujourd'hui, est extrêmement curieux. (…)
        Ce côté 'antiquaire' de notre esprit est très curieux: parce qu'une chose a été faite en 1530, c'est une belle chose."
(pàg. 88-89)


Fragments extrets de Entretiens avec Marcel Duchamp, de Georges Charbonnier, André Dimanche Editeur, Marseille 1994



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En espiral: [edició 2001]   [edició 2000]    [edició 1999]  
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